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Un bref résumé des Enseignements du Bouddha
LES QUATRE NOBLES VÉRITÉS
Article préparé par le Centre Bouddhique du Bourget
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LE NOBLE SENTIER OCTUPLÉ ET LA PRATIQUE DU DHAMMA
En raison du fait que les racines de l'ignorance sont si intimement entremêlées avec la structure de la psyché, l'esprit non éveillé est capable de se décevoir lui-même avec une ingéniosité époustouflante. La solution par conséquent requiert plus que le simple fait d'être gentil, aimant et attentif en pleine conscience dans l'instant présent. Le pratiquant doit « s'armer » d'une certaine expertise afin d'utiliser un ensemble d'outils destinés à déjouer, survivre à, et finalement déraciner les tendances malhabiles de l'esprit. Par exemple, la pratique de la générosité (dana) érode les tendances habituelles du cœur à l'égard de l'envie impérieuse et donne des leçons valables au sujet des motivations sous-jacentes, et les résultats des actions habiles. La pratique de la vertu (sila) nous protège contre le fait de nous égarer follement au loin et dans la voie du danger. La culture de la bonne volonté (metta) aide à affaiblir le pôle attractif séduisant de la colère. Les dix souvenirs offrent des façons d’atténuer le doute, de supporter la douleur physique avec calme, de maintenir un sain sentiment de respect de soi, de surmonter la paresse et la complaisance, et de se prévenir de la luxure débridée. Et il y a beaucoup plus de compétences à apprendre.
Les bonnes qualités qui émergent et mûrissent de ces pratiques non seulement aplanissent le chemin du voyage vers Nibbana; mais aussi, avec le temps, elles ont pour effet de transformer le pratiquant en un membre plus généreux, aimant, compatissant, paisible et lucide de la société. La recherche sincère de l’Éveil par l’individu est donc un don inestimable et opportun à un monde qui a désespérément besoin d’aide.
Le discernement (pañña)
Le Sentier Octuple est mieux compris comme un ensemble de qualités personnelles à développer, plutôt que comme une séquence d’étapes le long d’un chemin linéaire. Le développement de la vision juste et de la pensée juste (les facteurs généralement identifiés avec la sagesse et le discernement) facilite le développement de la parole juste, de l’action juste et des moyens d’existence justes (les facteurs identifiés avec la vertu). Au fur et à mesure que la vertu se développe, l’effort juste, la pleine conscience, et la concentration juste (les facteurs identifiés avec la concentration) se développent aussi. De même, à mesure que la concentration mûrit, le discernement évolue à un niveau encore plus profond. Et ainsi le processus se déroule : le développement d’un facteur favorise le développement du prochain, en élevant le pratiquant dans une spirale ascendante de maturité spirituelle qui finit par aboutir à l’Éveil.
Le long voyage vers l’Éveil commence sérieusement par les premiers élans provisoires de la vision juste — le discernement par lequel on reconnaît la validité des quatre Nobles Vérités et le principe du kamma. On commence à voir que notre bien-être futur n’est ni prédestiné par le destin, ni laissé aux caprices d’un être divin, ni au hasard. La responsabilité de notre bonheur repose totalement sur nos propres épaules. En voyant cela, les buts spirituels deviennent soudainement clairs : renoncer aux tendances invétérées habituelles de l’esprit en faveur de celles qui sont habiles, bénéfiques. Au fur et à mesure que cette juste résolution se renforce, le désir sincère de vivre une vie moralement droite et de choisir ses actions avec soin se développe aussi.
À ce stade, de nombreux adeptes prennent l’engagement intérieur de prendre à cœur les enseignements du Bouddha, de devenir "bouddhiste" par l’acte de prendre refuge dans le Triple Joyau : le Buddha (à la fois le Bouddha historique et notre propre potentiel inné pour l’Éveil), le Dhamma (à la fois les enseignements du Bouddha et la Vérité ultime vers laquelle ils pointent), et le Sangha (à la fois la lignée monastique ininterrompue qui a conservé les enseignements depuis l’époque du Bouddha, et tous ceux qui ont atteint au moins un certain degré d’Éveil). Avec ses pieds ainsi plantés sur un sol solide, et avec l’aide d'un ami spirituel ou professeur (kalyanamitta) pour éclairer le sentier, on a des conditions favorables pour avancer sur le sentier, en suivant les traces laissées par le Bouddha lui-même.
La vertu (sila)
La vision juste et la résolution juste continuent de mûrir grâce à l’élaboration des facteurs de cheminement associés à sila, ou vertu, à savoir la parole juste, l'action juste et les moyens d'existence justes. Ils sont condensés sous une forme très pratique dans les cinq préceptes, le code de conduite éthique de base auquel tout bouddhiste pratiquant souscrit : s’abstenir de tuer, de voler, d'inconduite sexuelle, de mentir et d'utiliser des substances intoxicantes. Même le code complexe de 227 règles des moines et des 311 règles des religieuses ont en fin de compte ces cinq préceptes de base pour fondement.
La concentration (samadhi)
Ayant pris pied dans la purification de son comportement extérieur par la pratique de sila, le travail essentiel a été posé pour plonger dans l’aspect le plus subtil et transformateur du sentier : la méditation et le développement du samadhi ou concentration. Cela est expliqué en détail dans les trois derniers facteurs du sentier concernant la méditation et le développement du samadhi ou concentration : l’effort juste, par lequel on apprend à favoriser les qualités habiles de l’esprit par rapport aux autres ; la pleine conscience juste, par laquelle on apprend à garder son attention continuellement focalisée sur l'instant présent de l’expérience ; et la concentration juste, par laquelle on apprend à immerger l’esprit si profondément et inlassablement dans son objet de méditation qu’il entre dans un jhana, une série d’états progressivement plus profonds de tranquillité mentale et physique.
La pleine conscience juste et la concentration juste sont développées en tandem par la pratique de satipatthana ("cadres de référence" ou "fondements de la pleine conscience"), une approche systématique de la pratique de la méditation qui englobe un large éventail de compétences et de techniques. De ces pratiques, la pleine conscience du corps (en particulier l'attention en pleine conscience de la respiration) est particulièrement efficace pour mettre en équilibre les qualités jumelles de tranquillité (samatha) et de perspicacité (vipassana) ou de clairvoyance. Par la pratique persistante, le méditant devient plus apte à développer les pouvoirs combinés de samatha-vipassana pour l’exploration de la nature fondamentale de l’esprit et du corps. [14] Tandis que le méditant maîtrise la capacité à cadrer son expérience immédiate en termes d’anicca (l'impermanence), dukkha (la souffrance ou l'insatisfaction), et anatta (le non-soi), même les manifestations les plus subtiles de ces trois caractéristiques de l’expérience sont contemplées finement. Dans le même temps, la cause fondamentale de dukkha — le désir — est constamment exposée à la lumière de la conscience. Finalement, la soif est laissée sans lieu où se cacher, l’ensemble du processus karmique qui fabrique dukkha se défait, le huitième chemin atteint son noble apogée, et le méditant gagne, enfin, son premier aperçu indubitable de l’Inconditionné — Nibbana.
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Samadhi Bouddha Statue - Anuradhapura - Sri Lanka IV-Ve Siècle