Centre Bouddhique International

le Bourget - France

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Comment approcher l’état de

libération du Samsara.

 

Par

Bhanté Parawahera Chandaratana - Centre Bouddhique International du Bourget

 

 

 

 

 

 

Selon le Bouddha, il faut observer quotidiennement la pratique de dana, sila et bhavana.

 

Dans la vie quotidienne, il nous est aisé, si nous le souhaitons sincèrement, de pratiquer le Dana. De plus, dana, sila et bhavana existent dans les autres traditions spirituelles et religieuses. Avant la naissance du Bouddha les 5 ou 8 préceptes existaient déjà (les préceptes à observer tels que s’abstenir de tuer des êtres vivants, de voler, de mauvaise conduite sexuelle, de mensonges et de produits intoxicants, auxquels s’ajoutent trois autres préceptes, ce qui totalise huit préceptes à observer lors des jours de pleine lune alors qu’en temps normal on est supposé n’observer que cinq préceptes)  et Gautama Siddhartha n’a rien innové à ce sujet. Par exemple, la reine Mahamaya, mère du Bouddha, a observé les 8 préceptes (les 6 ème, 7 ème et 8 ème préceptes consistant en s’abstenir de manger après midi, de danser, de chanter, de jouer de la musique, de se décorer le corps, de faire usage de parfums, etc., d’utiliser des lits luxueux et très confortables, le but de ces préceptes n’étant pas d’éviter de commettre le mal, mais de pratiquer le détachement)  le jour de la naissance du futur Éveillé Omniscient, c’est-à-dire son fils Gautama Siddhartha. Même les Jhana, ou absorptions mentales, que l’ascète Gautama, le futur Bouddha, a réalisé plus tard dans sa vie, existaient avant la naissance du Bienheureux. Le futur Bouddha a réalisé ces jhana auprès de célèbres maîtres de son temps, Alarakalama et Udakarama. Ceux qui trépassent dans des états de jhana avec formes (rûpa jhana) ou sans formes (arûpa jhana) renaissent dans les mondes sublimes correspondant à ces jhana. Ceci dit, ces mondes ne sont pas éternels et c’est cela la découverte extraordinaire faite par Bouddha. Ils participent de la loi de l’impermanence, anicca niyama.

 

Bouddha est celui qui a découvert cette vérité, qui a réalisé le Nibbana, qui est au-delà des jhana, et qui a aussi découvert la voie unique (ekayana) conduisant à la libération sous la forme du noble sentier octuple (ariya atthangika magga). En fait seuls les 4 premiers préceptes sont indispensables pour l’observance du Noble Sentier Octuple. Ils consistent à ne pas tuer d’êtres vivants, ne pas voler, ne pas mentir et ne pas commettre des actes malsains vis-à-vis de la sensualité comme l’adultère, le viol, etc. Ces actions au sein de la société sont nuisibles à son harmonie et à l’ordre public. Ceci dit, le cinquième précepte, qui consiste à éviter les liqueurs alcoolisées, n’est pas forcément inclus dans le Noble Sentier Octuple, car la prise d’une boisson alcoolisée en petite quantité et occasionnellement ne nuit pas à la pratique du Dhamma. Par contre, un état d’ivresse avancée peut conduire une personne à commettre des actes malsains, voire criminels, ce qui est alors contraire au Dhamma. Toutefois, il est préférable de ne jamais consommer d’alcool, ne serait-ce que pour la santé physique et mentale.

 

Dans le Noble Sentier Octuple, le Bouddha nous a conseillé la pratique de samma vaca, la parole Juste, consistant à s’abstenir de mentir (musavada), s’abstenir de paroles rudes (Parusa Vacca), de paroles calomnieuses (pisuna vacca) et de paroles vaines et inutiles (sampapalapa). Puis, il y a la pratique de samma kammanta (l’action juste). Elle consiste en s’abstenir de tuer (panatipata), s’abstenir de voler (adinadana), s’abstenir de mauvaises conduites sexuelles (kamesu miccacara). Puis il y a la convoitise ou l’avidité (zbhijja), la colère, malveillance ou inimitié (vyapada), les vues erronées (miccha ditthi), c’est-à-dire nourrir une vision fausse de nous-mêmes et du monde qui nous entoure, sans pouvoir contempler la réalité des phénomènes mentaux et matériels tels qu’ils sont.  

 

Dans l’ariya atthangika magga, nous trouvons samma ajiva, les moyens d’existence justes. En effet, dans l’exercice de notre profession, il est crucial d’être toujours intègre et honnête. Certaines professions sont même déconseillées aux observants sincères du Dhamma, comme par exemple la vente d’armes, le commerce de prostituées, le trafic de drogues, la vente de liqueurs, etc.
Dans le domaine de l’effort juste (samma vayama) nous trouvons ce que Bouddha appelait catur sammapadana, les quatre efforts suprêmes : face à quelque chose de mal et de non salutaire (papa kamma) qui n’est pas encore apparu, il élève sa volonté, fait un effort, secoue son énergie, y applique son esprit et lutte. Face à quelque chose de mal et de non salutaire (papa kamma) qui est apparu, il élève sa volonté, fait un effort, secoue son énergie, y applique son esprit et lutte. Face à quelque chose de salutaire (kusalanam) qui n’est pas encore apparu, il élève sa volonté, fait un effort, secoue son énergie, y applique son esprit et lutte.

 

Face à quelque chose de salutaire (kusalanam) qui est apparu, pour le maintenir et ne pas le négliger, pour le développer, l’amener à pleine maturité, le faire grandir, il élève sa volonté, fait un effort, secoue son énergie, y applique son esprit et lutte. Cela est appelé l’effort juste.   
C'est un disciple qui espère, lutte, s'efforce, maîtrise son mental, s'exerce pour combattre l'apparition du Mal et de mauvaises pensées, en premier lieu. Puis deuxièmement il essaie de se débarrasser des états néfastes existant déjà chez l’homme, troisièmement, il essaie de faire apparaître des états mentaux bons et sains n’existant pas encore, puis quatrièmement il essaie de développer et d’amener à la perfection les états mentaux bons et sains qui sont déjà présents.

 

Il est bon de clarifier et de comprendre ce que sont les kusala et les akusala. Les akusala consistent en les cinq empêchements qui, premièrement, sont kamacchanda (les désirs sensuels en lien avec les six formes de perceptions sensorielles avec l’œil, l’oreille, la bouche, la langue, le corps et le mental). Ainsi, par les six formes de perceptions sensorielles, vinnana, la conscience, apparaît.
Puis, il y a vyapada, c’est-à-dire la haine ou encore la colère, qui surgissent en lien avec quelque chose que nous n’aimons pas.
Puis, troisièmement, il y a thina middha, la torpeur et la paresse.

 

Quatrièmement, il y a uddhacca kukkucca, l’agitation et l’inquiétude.
Enfin il y a viccikicca, le doute sceptique quant à la véracité des enseignements du Dhamma.
Pour ce qui est des kusala, ils se développent grâce à la méditation samatha, et donc les cinq entraves, appelées Nivarana et qui ont été énumérées plus haut, sont temporairement inhibées dans un esprit lumineux et limpide. Petit à petit, les jhana, absorptions mentales, et tout d’abord le 1er Jhana, apparaissent.

 

Le 1er jhana est composé des facteurs suivants : vitakka (l’application initiale), vicara (l’application soutenue), piti (la joie), sukha (le bonheur) et ekagatta (l’unification de la concentration mentale sur un objet fixe).  
Le 2ème jhana est composé des facteurs suivants : piti (la joie), sukha (le bonheur) et ekagatta (l’unification de la concentration mentale sur un objet fixe).  

 

Le 3ème jhana est composé des facteurs suivants : sukha (le bonheur) et ekagatta (l’unification de la concentration mentale sur un objet fixe)
Enfin le 4ème jhana est composé des facteurs suivants : upekkha (l’équanimité) et ekagatta (l’unification de la concentration mentale sur un objet fixe).

 

Tous ces Jhana renvoient à Kusala, c’est-à-dire aux consciences habiles et bénéfiques à la pratique du Dhamma afin de réaliser le but ultime, qui est Nibbana. En fait, le développement des Jhana est le couronnement de nos efforts généreux à cultiver Samma Vayama, c’est-à-dire l’effort juste.
 
Ce qui nous conduit finalement au Nibbana, c’est ce que nous appelons samma sati, l’attention en pleine conscience juste. Elle consiste en Satipatthana, c’est-à-dire l’établissement de l’attention. C’est pour cela qu’un Bouddha apparaît dans le monde, afin de nous révéler la voie unique (ekayana) conduisant à Nibbana, c’est-à-dire les quatre établissements de l’attention (kâyanupassana, l’introspection dans le corps, vedananupassana, l’introspection dans les sensations, cittanupassana, l’introspection dans le mental, et enfin dhammanupassana, l’introspection dans les phénomènes mentaux).

 

C’est satipatthana qui est la marque spécifique et unique aux enseignements du Bouddha, que nous ne trouvons pas dans les autres traditions spirituelles. En effet, Dana (la générosité), Sîla (la vertu éthique) et havana (la culture mentale ou méditation) existent bien dans les autres religions ou voies spirituelles, mais sans l’apport très précieux de la méditation vipassana, qui est unique au Bouddhisme.
Pour développer le satipatthana, nous avons besoin de quatre facteurs qui sont viriya (l’énergie), panna (la sagesse), sati (l’attention en pleine conscience) et upekkha (l’équanimité). Un Bouddhiste qui pratique samma sati correctement focalise son esprit sur les phénomènes mentaux et matériels du présent uniquement.   

 

vipassana renvoie immanquablement à samma sati. En cultivant les quatre fondements de l’attention, les satta bojjhanga (les sept facteurs d’éveil) se développent également. Avec les satta bojjhanga, nous comprenons les tilakkhana (les trois caractéristiques de l’existence) qui sont anicca (l’impermanence des phénomènes mentaux et matériels), dukkha (l’insatisfaction, la souffrance) et anatta (Le non-Soi, la non-substantialité).

 

C’est cela que nous appelons dhammaviccaya (l’investigation dans les Dhamma). Puis, on développe viriya (l’énergie), et l’esprit devient très paisible et ainsi se développe piti (la joie, le ravissement). En fait, les souillures du mental, appelées kilesa, disparaissent petit à petit sous l’effet de la méditation vipassana, de la même manière que les Nivarana (empêchements) sont temporairement inhibés et réduits par la méditation samatha.

 

Ceci dit, les autres religions sont profondément attachées à ce que nous pouvons appeler nicca (ce qui est permanent) sukha (le bonheur, la félicité) et atta (la personnalité permanente, le Soi).
Par le développement de l’introspection intuitive, nous pouvons développer la vision intérieure d’anicca, de dukkha et d’anatta. Par cela, notre mental cultive le détachement vis-à-vis du monde.
Ainsi, par cela, passadhi, la tranquillité mentale, se développe.
 
Puis, se développe, à partir de ce point crucial, samma samadhi, la concentration juste, en fait vipassana samadhi, c’est-à-dire la concentration inhérente à l’introspection intuitive.
 
Avec samatha, les souillures ont été temporairement affaiblies, mais avec vipassana samadhi, elles peuvent être totalement éradiquées.
Il est dit dans la tradition du Theravada que le Bouddha (dans le Mahaparinibbana Sutta), avant d’entrer dans le Nibbana complet (de trépasser dans sa grande extinction ultime (mahaparinibbana), a pratiqué Samma Sati en prenant pour objet dans le sens ascendant les 4 rupa jhana (jhana avec forme), puis les 4 arupa jhana (les Jhana sans forme). Ensuite il redescendit du quatrième arupa jhana jusqu’au 1er rupa jhana. Puis enfin il remonta jusqu’au 4ème Rupa, en le contemplant à la lumière de vipassana samadhi, et il expira immédiatement en mahaparinibbana (Pour explications détaillées, veuillez vous référer au Mahaparinibbana sutta, où les dernières paroles du Bouddha, qui furent « vaya dhamma sankhara apamadena sampadetha », traduites en français par « Œuvrez avec vigilance, les formations conditionnées sont impermanentes »).

 

Donc, les jhana que l’on a développés par samma vayama, l’effort juste, peuvent être expérimentés à nouveau, mais à la lumière de l’application de vipassana samadhi, par lequel on cultive upekkha en contemplant ces jhana, et c’est cela même ce septième facteur d’éveil, c’est-à-dire l’équanimité, upekkha.
Par cela même, un degré de vipassana samadhi appelé sankharupekkhanana se développe et est expérimenté. Par ce degré de vipassana, on réalise le détachement total.
  
En fait, dans l’étape de la troisième réalisation de Nibbana, appelée anagami, on élimine complètement et définitivement cinq entraves, qui sont sakkaya ditthi (la croyance en un soi ou ego permanent), viccikicca (le doute sceptique quant à la véracité et la validité des enseignements du Bouddha), silabbata paramasa (la croyance en l’efficacité des rites et des cérémonies), kama râga (les plaisirs sensuels) et patigha (la répugnance, la haine).

 

Les trois premières entraves susmentionnées sont éliminées par la première expérience de Nibbana, appelée sotapatti (l’entrée dans le courant). Avec aakadagami (la deuxième expérience de Nibbana), l’étape de celui qui ne revient qu’une fois, la quatrième et la cinquième entraves sont temporairement éliminées.

 

Quand l’anagami recommence à pratiquer le satipatthana, progressivement, rûpa râga (l’attachement aux rupa jhana, les absorptions mentales avec formes), arûpa râga (l’attachement aux arûpa Jhana, (attachement aux rupa jana, les absorptions mentales sans formes), mâna (l’orgueil ou la vanité), uddhacca (les agitations mentales) et finalement la source principale des errances du Samsara et de la souffrance, avijja, l’ignorance, sont éradiqués. Ainsi, celui qui élimine ces entraves ou empêchements, est appelé un Arahant, c’est-à-dire celui qui est digne et méritant, et qui ne reviendra jamais dans ce monde après son trépas appelé Pari Nibbana. La réalisation finale et définitive des Quatre Nobles Vérités est appelée vimutti nâna dassana, la libération par la vision de la réalité telle qu’elle est.

 

 

 

 

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 Samadhi Bouddha Statue - Anuradhapura - Sri Lanka  IV-Ve Siècle