Samadhi Bouddha Statue - Anuradhapura - Sri Lanka IV-Ve Siècle
Les pensées s'arrêtent-elles jamais?
Bhante Gunaratana Maha Thera
Le Bouddha conseilla aux bhikkhus, “Bhikkhus, quand vous êtes réunis ensemble vous devriez faire une des deux choses suivantes: avoir des discussions sur le Dhamma ou observer le silence noble.”
Le silence noble est l'état du mental où il n'y a plus de pensées. L'esprit est totalement silencieux. Le flot des pensées peut être arrêté si nous entraînons notre esprit grâce à une pratique méditative correcte.
Un méditant devrait commencer la pratique en dirigeant son attention de manière indivisible et ininterrompue sur un objet unique sans verbaliser l'expérience dans le mental. Quand vous verbalisez et conceptualisez les choses, vous interrompez votre attention d'une part et de l'autre vous perpétuez vos pensées.
Quand vous verbalisez, vous ajoutez de plus en plus de concepts ou d'idées. La réalité n'est pas un mot ou un verbe. La réalité est ce que vous expérimentez. Quand vous expérimentez des douleurs et des brûlures ou du plaisir et du bonheur au cours de votre méditation, vous notez directement l'expérience telle qu'elle est exactement. Vous n'avez pas besoin d'un pont conceptuel entre votre expérience et la connaissance directe. Quand vous avez faim, vous expérimentez la faim sans dire: “J'ai faim, j'ai faim.”
Vous avez besoin de noms propres et de verbes seulement pour communiquer votre expérience. Quand vous méditez vous observez le silence total, sans essayer de parler à quiconque de votre expérience. Vous devriez vous connaître vous-mêmes exactement tel que vous êtes. Vous devriez vous sentir vous-même exactement tel que vous êtes.
Depuis l'âge de bébé jusqu'à l'université, nous apprenons à utiliser des mots, des concepts et des idées afin que les autres nous comprennent. Mais pendant la méditation, vous n'essayez pas d'exprimer votre expérience à qui que ce soit. En entraînant votre esprit à demeurer silencieux, vous le rendez silencieux. Si vous rajoutez plus de mots à l'esprit, l'esprit demeure simplement agité.
Nous avons tous remarqué des gens assis ou marchant dans la rue et monologuant avec eux-mêmes. Ils ne peuvent réduire leur esprit au silence. C'est un exemple extrême du fait d'être incapable de calmer les pensées. Mais dans notre voie propre, nous luttons avec ceci dans notre vie quotidienne et dans la méditation. Cela revient à cela; à moins que vous essayiez, vous ne pouvez jamais arrêter tout ce flot de pensées. Vous calmez les pensées seulement quand vous êtes déterminé à le faire.
Tournez votre attention totale vers ce que vous expérimentez au travers des six sens sans étiqueter ce qui apparaît. Il existe certaines choses que vous expérimentez et pour lesquelles les mots ne sont pas nécessaires. Vous les connaissez simplement. Votre esprit les connaît. Vous demeurez avec cette connaissance. Quand vous avez froid, il est habituel et normal de vous dire à vous-mêmes, “Oh, il fait froid.” Quand vous avez chaud, vous pensez automatiquement, “Oh, il fait chaud.” Tournez simplement votre attention vers le froid que vous sentez sans cette pensée additionnelle. Ressentez simplement la chaleur sans en verbaliser l'expérience. Quand vous vous souvenez d'avoir visité un lieu, ou d'avoir parlé à quelqu'un, ou d'avoir mangé une glace ou d'avoir tenu quelqu'un par la main, devenez simplement conscient de ces objets de votre mémoire.
Vous avez besoin de développer une concentration totale afin d'arrêter le flot de vos pensées. Vous faites cela en tourner totalement votre attention vers un objet à la fois. Si vous commencez la pratique en focalisant votre esprit exclusivement sur un objet, vous conditionnez progressivement votre esprit afin de subjuguer vos pensées discursives en soutenant un contact initial avec l'objet.
Quand vous écoutez les battements de votre cœur, vous n'avez pas besoin de concepts pour sentir cette manifestation subtile. Pareillement, pendant la méditation, tandis que vous dirigez totalement votre attention vers les inspirations et les expirations, vous pouvez noter le commencement, le milieu et le fin de chaque inhalation et de chaque exhalation. Vous pouvez remarquer la brève pause existante entre les inhalations et les exhalations. Vous pouvez remarquer ces manifestations naturelles de votre respiration si vous dirigez totalement votre attention vers elles.
L'esprit se meut si rapidement que nous pouvons quand même l'entraîner à remarquer ces évènements exactement au moment où ils surviennent car ils se produisent en succession. Si vous conceptualisez ces manifestations alors vous serez incapable de les noter. Au lieu de cela, vous vous arrêtez à des mots et vous manquez l'expérience réelle et directe. Vous n'avez pas à dire, “Ceci est le commencement de l'inhalation,” ou “Ceci est le milieu” ou encore « Ceci est la fin », remarquez simplement ces stades de manifestation. Vous n'avez pas besoin de pensée pour les remarquer. Tout ce dont vous avez besoin c'est d'attention.
Nous ne devenons jamais semblable à un végétal quand nous arrêtons le flot de nos pensées. Un esprit calme est réceptif à l'introspection intuitive. Et vous pouvez arrêter le processus des pensées en entraînant systématiquement votre esprit.
J'utilise la phrase “calmant l'esprit” ou “réduisant l'esprit au silence” pour signifier le fait de ne pas avoir de pensées à l'esprit, mais cela ne signifie pas ralentir l'esprit comme par exemple ralentir le métabolisme du corps durant l'hibernation. Cela signifie simplement ne pas avoir d'habitude de production de pensées dans l'esprit.
Le cerveau ne manufacture pas les pensées à moins que nous le stimulions avec des verbalisations habituelles. Quand nous nous entraînons à arrêter de verbaliser par une pratique constante, le cerveau peut expérimenter les choses telles qu'elles sont. En établissant un silence mental, nous pouvons expérimenter une paix réelle. Aussi longtemps que diverses formes de pensées agitent le cerveau, nous n'expérimentons pas 100 pour cent de paix.
La paix n'est pas la pensée, pas un concept, c'est une expérience non-verbale. Un être peut rester dans cet état paisible jusqu'à sept jours. Mais avant que quelqu'un n'atteigne un état mental aussi paisible, il devrait s'entraîner progressivement à ralentir le flot des pensées. Une fois qu'elles sont ralenties, les pensées fanent et plus de pensées nouvelles sont nourries par le cerveau.
Même quand nous ne méditons pas, nous expérimentons profondément de nombreuses choses que souvent nous ne pouvons exprimer par des mots. Nous pourrions essayer de trouver un mot ou un verbe pour cette expérience. Nous pourrions l'appeler l'intuition. Mais les intuitions pourraient surgir sans qu'aucun mot ou concept ne leur soit associé. Vous pouvez aussi écouter des sons sans qu'aucun mot n'apparaisse dans votre esprit. Il est dit que la meilleure manière d'apprécier la musique c'est d'écouter de la musique. Tandis que vous écoutez de la musique, vous écoutez le son sans essayer de verbaliser le son. Considérez par exemple comment vous écoutez le chant d'un oiseau; vous ne verbalisez pas le son. Vous pourriez dire “Le robin chante comme ça...” mais c'est votre imagination.
Ceci signifie que hormis dans des états de méditation vous pouvez expérimenter de nombreuses choses très subtiles en dirigeant simplement votre attention totale vers vos sens. La plupart du temps, nous verbalisons des choses après les avoir expérimentées, pas au moment où nous les expérimentons. Mais quand vous tournez totalement votre attention non verbale vers quelque chose, vous développez de la concentration, ce qui n'est pas possible quand vous verbalisez. Les mots stimulent l'esprit. Par conséquent l'esprit continue à produire de plus en plus de mots et nous les exprimons par des pensées. Par une attention non verbale, vous pouvez minimiser le nombre de mots que vous utilisez. Quand les mots sont minimisés, les pensées sont minimisées. Finalement, ce processus rend l'esprit libre de pensées. Mais si vous ne minimisez pas les mots, vous ne pouvez pas libérer l'esprit des pensées.
Quand vous expérimentez quelque chose, si vous n'essayez pas de traduire vos expériences par des mots vous ne faites simplement que l'expérience, aucune pensée n'apparaît. Les visions, les sons, les odeurs, les goûts, les expériences tactiles, ils peuvent tous être expérimentés directement sans les mots. Quand vous utilisez des mots, vous bloquez votre expérience directe des objets sensoriels.
Après tout, ce ne sont pas les mots qui vous font expérimenter ce que vous expérimentez. Supposez que la couleur blanche apparaisse sous vos yeux. La blancheur se reflète dans vos yeux. L'esprit la connaît telle qu'elle est. Seulement quand vous voulez exprimer ce que vous avez vu alors vous avez réellement besoin de mots. Ceci dit la blancheur n'est pas un mot, mais ce qu'elle est. La noirceur n'est pas un mot, mais ce qu'elle est. Ceci est vrai aussi pour ce qui est sucré, amer, aigre, la dureté, et toutes les choses que vous expérimentez.
Le cerveau ne fabrique pas des pensées à partir de rien. Il doit être nourri de quelque chose afin de l'utiliser comme matériel de base afin de fabriquer des pensées. Le matériel de base est ce dont vous l'avez nourri dans le passé. Si vous ne l'avez pas nourri de pensées, si vous l'avez entraîné en évitant les verbalisations, le cerveau ne peut fabriquer des pensées à partir d'un vide.
#5 - Niyama Dharma dans le Bouddhisme
Conformément au Bouddhisme, il existe cinq ordres ou procédés (niyama) qui opèrent dans les royaumes physiques et mentaux.
Ils sont:
Utu Niyama – l'ordre physique non-organique, les phénomènes saisonniers des vents et des pluies. L'ordre infaillible des saisons, les changements et évènements saisonniers caractéristiques, les causes des vents et des pluies, la nature des chaleurs, etc., tous appartiennent à ce groupe.
Bija Niyama – l'ordre des germes et des semences (l'ordre physique organique), e.g. du riz produit à partir de semences de riz, le goût sucré de la canne à sucre ou du miel, les caractéristiques spécifiques de certains fruits, etc. La théorie scientifique des cellules et des gènes et la similitude physique des jumeaux pourraient être attribuées à cet ordre.
Karma Niyama - l'ordre de l'action et de ses fruits, e.g., les actions désirables et indésirables produisent des résultats bons et mauvais correspondants. Aussi surement que l'eau tend vers son niveau propre alors aussi le Karma, quand l'opportunité lui est donnée, produit ses résultats inévitables, non sous la forme d'une récompense ou d'une punition mais en tant que séquence innée. Cette séquence d'action et d'effet est aussi naturelle et nécessaire que les voies empruntées par le soleil et la lune.
Dhamma Niyama - l'ordre de la norme, e.g., le phénomène naturel se manifestant sous la forme de l'avènement d'un Bodhisattva lors de sa dernière naissance. La gravitation et les autres lois de la nature similaires. La raison naturelle pour laquelle certains êtres sont bons et ainsi de suite, pourrait être incluse dans ce groupe.
Citta Niyama - l'ordre ou l'esprit ou les lois de la psyché, e.g., les procédés de la conscience, l'apparition et la dissolution de la conscience, les constituants de la conscience, le pouvoir de l'esprit, etc., incluant la télépathie, telaesthesia???, le phénomène rétro-cognitif, la prémonition, la clairvoyance, la clairaudience???, la lecture des pensées et tous les autres phénomènes psychiques qui demeurent inexpliqués par la science moderne.
Samadhi-Bhavana dans le Bouddhisme
La méthode de raccourci pour les êtres ordinaires
Le système complet du Bouddha
Notre plus grand devoir
Rien en excédent
(Sélections de passages d'un discours donné le 5 Mai1987)
Il existe de nombreuses formes, styles, et systèmes de samadhi-bhavana (culture mentale par la concentration; méditation). Aujourd'hui j'aimerais discuter au sujet de samadhi-bhavana telle qu'elle fut spécifiquement introduite et recommandée par le Seigneur Bouddha lui-même. Elle apparaît dans le Pali Tipitaka à la fois sous la forme de références brèves et d'explications détaillées. Nous l'appelons "la samadhi-bhavana du Bouddha." ce n'est pas le style Birman ou Chinois ou encore Sri Lankais auxquels nous nous consacrons ces jours-ci. Ce n'est pas le système de Ajahn ceci, de maître cela, Guru ceci, ou Professeur Cela dans lequel nous nous sommes enfermés ces jours-ci. Ce n'est pas non plus le style de Suan Mokkh ou tout autre Wat. Ce n'est rien de toutes ces choses. Au lieu de tout cela, c'est la voie correcte recommandée par le Bouddha. Il déclara que cette forme de samadhi-bhavana était celle par laquelle il avait réalisé le Dhamma de l'Éveil parfait. Nous allons parler de ce style de samadhi-bhavana en particulier. (C.1)
C'est le système de samadhi-bhavana qui est connu sous le nom de anapanasati-bhavana ou, plus simplement, Anapanasati. Il contient en tout seize étapes ou objets qui doivent être pratiqués. Il semble, cependant, que certaines personnes n'aiment pas cela et se plaignent que c'est trop leur demander. Concernant ce point, j'insiste que le Bouddha n'a jamais enseigné quelque chose qui n'était pas nécessaire ou incomplet. C'est à dire que cette méthode de samadhi-bhavana en 16 étapes n'est ni de trop ni trop peu. Si vous êtes assez patient pour parcourir les seize étapes, vous trouverez le système complet. Si vous êtes incapable de le faire, il existe quand même une version condensée qui est adéquat pour les personnes fainéantes. (C.2)
#6 - LA METHODE DE RACCOURCI POUR LES ÊTRES ORDINAIRES
Nous commencerons à parler pour ceux qui n'aiment pas « beaucoup » Par le mot "beaucoup" ils semblent signifier trop ou en surplus. Bien, le surplus n'est pas nécessaire. Nous prendrons juste ce qui est suffisant pour les êtres ordinaires, que nous appelons « la méthode de raccourci". L'essence de cette méthode consiste à concentrer le mental de façon adéquate, juste assez, ce que n'importe quelle personne ordinaire peut faire, et ensuite utiliser ce citta concentré afin d'observer aniccam-dukkham-anatta – les trois caractéristiques de l'être – jusqu'à la réalisation de sunyata et de tathata. Avec cette pratique ils réaliseront autant les bénéfices du samadhi. Ils obtiendront les résultats de « l'échelle amusante » qui consiste à éradiquer dukkha, mais il n'y aura pas de qualités spéciales en addition à cela. De telles capacités spécifiques ne sont pas nécessaires de toutes façons. Donc rendez l'esprit suffisamment concentré, puis examinez aniccam-dukkham-anatta. Pratiquez juste la première tétrade de Anapanasati suffisamment puis pratiquez la quatrième tétrade suffisamment. C'est tout! Suffisant n'est pas beaucoup, ce n'est pas complet non plus, mais c'est déjà assez bien. C'est le raccourci pour les personnes ordinaires. (C.3)
Maintenant nous allons aborder la première méthode consistant à pratiquer la première tétrade. Rendez la respiration subtile et le corps entier sera subtil aussi, c'est à dire tranquille et calme. C'est juste suffisant pour avoir un esprit bien disposé à la pratique de vipassana. Puis citta atteint un niveau tel qu'il parvient à contempler aniccam-dukkham-anatta qui se manifeste dans chaque partie et particule de notre corps. L'impermanence, l'insatisfaction, et l'absence de soi dans chaque organe et composante de notre corps – a la fois physique et mental - sont contemplés jusqu'à la réalisation de la quiddité. Quand la quiddité est contemplée nous ne sommes plus assujettis au pouvoir du dualisme. C'est suffisant. Ce niveau de contemplation est suffisant pour pénétrer de plus en plus dans le Dhamma jusqu'à la réalisation de l'Ultime. C'est le raccourci pour les personnes ordinaires. Ceux qui vivent dans le monde ordinaire de tout un chacun – même ceux qui mènent une vie de ménage – sont capables de faire au moins cela. (C.4)
#7 - LE SYSTEME COMPLET DU BUDDHA
Maintenant nous allons parler du système que le Bouddha a lui-même pratiqué et expliqué. C'est le système complet ou parfait, au lieu du raccourci, nommément, la forme complète de Anapanasati en quatre tétrades. S'il vous plaît soyez patient et prenez le temps d'écouter. Vous devriez être en mesure de comprendre quelque chose à ce sujet et ensuite vous en tirerez certainement des bénéfices. Si vous pensez toujours que c'est excessif ou en surplus, alors c'est que vous n'avez véritablement rien compris du tout. (C.5)
Nous pouvons pratiquer divers exercices de respiration de manière a comprendre ce phénomène respiratoire en observant ces respirations. Désormais nous savons que le souffle soutient et sert ce corps fait de chair. Cela a été connu au cours des âges de l'humanité, même avant que le Bouddha apparaisse dans le monde. Il existait de nombreuses méthodes de pranayama pratiquées avant l'époque du Bouddha. Quand le Seigneur Bouddha apparut, il entreprit la pratique de pranayama et il l'adapta à son système de contemplation du souffle. Nous régulons la vie et le corps au travers de la respiration. En conséquence, il existe quatre étapes dans la pratique: connaître la longue respiration, connaître la respiration courte, savoir comment le souffle régule le corps, et contempler la respiration de manière à ce qu'elle s'apaise de sorte que le corps s'apaise aussi. Ce sont les quatre étapes. Elles ne sont pas en trop. Pourquoi ne pas essayer de les pratiquer! Observez-les sincèrement et étudiez-les de façon authentique et scientifique. Alors ce ne sera pas difficile. (C.6)
Il existe de nombreux avantages et bénéfices à observer le pranayama qui sont sans liens directs avec la religion ou le Dhamma. Ils sont des incitations supplémentaires à vous intéresser au pranayama ou contrôle du souffle de sorte que vous gérerez la pratique correctement. Vous pouvez rallonger la durée de votre vie au-delà de la normale grâce au pranayama. Ou bien vous pourriez provoquer votre mort de manière immédiate, même aujourd'hui. Vous pouvez mourir au moment de n'importe quelle respiration que vous choisissez en contrôlant le pranayama. Vous pouvez avoir une respiration saine et un bon corps et en bonne santé grâce au pranayama. Vous pouvez pratiquer des sports, conduire une voiture, travailler dans un bureau, ou obtenir tout ce que vous souhaitez, si vous régulez le souffle ou le prana de la manière qui est en harmonie avec vos desseins. Nous souhaitons que vous sachiez que Anapanasati procure ces bénéfices secondaires en dehors du domaine religieux ou du Dhamma.(C.7)
#8 - NOTRE PLUS GRAND DEVOIR
La dernière tétrade renvoie au Dhamma: la nature et la Vérité de la nature. Quand citta est sous contrôle et obtient le samadhi qui est nécessaire, utilisez ce citta pour vous acquitter de la plus haute tâche. Par la plus haute nous signifions la tâche de connaître, de réaliser la Vérité. Grâce à vipassana, en observant (les phénomènes) avec vigilance et avec un esprit concentré, nous voyons la Vérité de toutes les choses. Nous réalisons que tous les phénomènes sont impermanents. Tout ce que nous expérimentons dans le présent est impermanent. Même les choses dont nous ne sommes pas conscients sont impermanentes, c'est à dire, en changement et transformations perpétuels. La seule exception s'applique à nibbana, la seule chose qui ne change jamais. Ainsi, nous connaissons l'aspect aniccam de toutes choses. De surcroît, le fait de l'impermanence nous opprime et nous force à expérimenter dukkha. En vérité, cet état de dukkha ne peut être enduré par qui que ce soit; il n'existe pas de soi ou d'âme qui peut se dresser face à elle. C'est anatta. Et donc nous réalisons aniccam-dukkham-anatta. Appréhendés ensemble, nous les appelons sunnata, vacuité du soi. Ensuite connaissez tathata, la quiddité ou "juste comme ça." Ceci est la première étape de la quatrième tétrade. Cela s'appelle "aniccam-nupassi." Ce mot seul englobe la réalisation de aniccam-dukkham-anatta-sunnata-tathata! Ils sont regroupés ensemble dans la même phase car ils sont tous la résultante du fait de percevoir aniccam de façon directe. (C.8)
En continuant nous voyons ceci: Oh! Une fois que aniccam est contemplé, une fois que l'impermanence est réalisée, l'attachement commence à s'estomper. Il se dissout et s'estompe petit à petit. Cela s'appelle réaliser viraga. Réalisant cette dissolution de l'attachement mène à: Owwh! C'est fini l'attachement est « caput »! Cela s'appelle réaliser nirodha: l'extinction complète de toutes les souillures et de dukkha. Si dukkha est éradiquée, alors nous réalisons: Wow! Maintenant c'est fini pour de bon, maintenant c'est complètement terminé. Nos fonctions et devoirs ont été réalisés et terminés. Il ne reste rien d'autre à faire. Il n'existe pas de dukkha ou de problèmes restants auxquels nous devrions être confrontés à nouveau. Cela s'appelle patinissagga: le jeter tout au loin. Il ne reste plus rien. C'est la tétrade finale, dhammanupassana, concernant la Vérité (sacca) de toutes choses. (C.9)
#9 - RIEN EN EXCEDENT
Finalement, vous pouvez vérifier par vous-même si c'est beaucoup de choses ou pas, s'il y a quelque chose en excédent ou pas. Nous étudions au début dukkha elle-même et la cause de l'apparition de dukkha. Puis nous étudions les fondements à partir desquels dukkha se manifeste: le corps et vedana. Nous poursuivons notre étude en examinant la chose qui expérimente que ce soit dukkha ou bien l'absence de dukkha, nommément citta. Finalement, nous étudions le Dhamma - la Vérité de toutes choses – de sorte que citta connaît, connaît, connaît, à tel point qu'il ne s'attache à rien. Connaissons le lâcher-prise.
Il y a beaucoup de choses à faire. Pour y arriver notre pratique doit être complète. Ainsi, il existe 16 étapes. Mais tandis que j'en parle et que je vous les explique, elles ne semblent pas excessives ou en excédent. Vraiment, il existe tellement de sujets à étudier et à connaître que le fait d'avoir seulement 16 étapes à franchir n'est pas excessif du tout. Certaines personnes diraient que c'est trop, qu'elles ne veulent pas les étudier et les pratiquer. Si elles ne pensent pas que cela peut les aider, bien, qu'elles fassent alors ce qui leur convient. Quiconque ne souhaite pas étudier et s'entraîner dans les 16 étapes complètes peut suivre une pratique condensée telle qu'elle a été expliquée précédemment. C'est déjà suffisant pour tirer un certain bénéfice des enseignements bouddhiques grâce à la technique de samadhi-bhavana.
#10 - Raisons de croire en la renaissance
« Je me suis souvenu de mes situations variées lors d’existences antérieures. »
-Majjhima Nikâya.
Pourquoi devrions-nous croire en la renaissance?
Le Bouddha est notre plus haute autorité sur le sujet de la renaissance. La nuit même de son illumination, pendant la première veillée, le Bouddha développa une connaissance de « rétrocognition » qui lui permit de contempler ses vies passées.
« Je me souviens, » déclare-t-il, « de mes diverses situations dans des existences antérieures comme suit : d’abord une vie, ensuite deux vies, puis trois, quatre, cinq, dix, vingt jusqu’à cinquante vies, puis cent, mille, cent mille et ainsi de suite. »
Pendant la deuxième veillée de la nuit le Bouddha, avec une vision clairvoyante, perçut les êtres comme disparaissant d’un état d’existence et réapparaissant dans un autre. Il contempla « les bas et les nobles, les beaux et les laids, les êtres heureux et les êtres malheureux, évoluant en fonction de leurs actes. »
*1
Ce sont les premières paroles prononcées par le Bouddha au sujet de la question de la renaissance. Les références textuelles prouvent de manière concluante que le Bouddha n’a pas emprunté cette vérité crue de la renaissance à une source préexistante, mais qu’il exprima d’après sa connaissance personnelle-une connaissance qui était supranormale, développée par ses efforts et qui pouvait être développée par autrui également.
*2
Dans son péan de joie, le Bouddha dit :
« J’ai erré pendant de nombreuses naissances, cherchant le bâtisseur de cette maison. Pleine de souffrances en fait est la naissance encore et encore. »
*3
Dans le Dhammacakka Sutta, son tout premier discours, le Bouddha, commentant la deuxième noble vérité, déclare : « Cette envie impérieuse même est ce qui conduit aux renaissances. » Le Bouddha conclut ce discours par ces paroles : « Ceci est ma dernière naissance. Il n’y aura plus de renaissances pour moi. »
Le Majjhima Nikâya relate que quand le Bouddha, par compassion envers les êtres, contempla le monde avec sa vision avant qu’il ne décide d’enseigner le Dhamma, il perçut les êtres, qui, habités par la peur, virent le mal et un monde au-delà.
*4
Dans plusieurs discours le Bouddha déclare clairement que les êtres qui ont fait du mal, après la mort, renaissent dans des états de malheur, et les êtres qui ont fait du bien renaissent dans des états de félicité.
En plus des histoires de Jataka très intéressantes, qui traitent des vies antérieures et qui sont d’une certaine importance sur le plan éthique, le Majjhima Nikâya et l’Anguttara Nikâya se réfèrent de façon ponctuelle à quelques-unes des vies passées du Bouddha.
Dans le Ghatîkâra Sutta
*5
le Bouddha relate au Vénérable Ânanda qu’il naquit en tant que Jotipâla, à l’époque du Bouddha Kassapa, son prédécesseur immédiat. L’Anâthapindikovâda Sutta
*6
décrit une visite nocturne de Anâthapindika au Bouddha, immédiatement après sa renaissance en tant que Deva. Dans le Anguttara Nikâya,
*7
le Bouddha fait une allusion à une naissance passée en tant que Pacetana, le charron. Dans le Samyutta Nikâya le Bouddha cite le nom de quelques Bouddhas qui l’ont précédé.
Une référence directe inhabituelle aux êtres qui ont trépassé apparait dans le Parinibbâna Sutta.
*8
Le Vénérable Ânanda désirait apprendre du Bouddha l’état futur de plusieurs personnes qui étaient mortes dans un certain village. La Bouddha lui décrivit patiemment leurs destinées.
De tels exemples purent être multipliés aisément dans le Tipitaka afin de montrer que le Bouddha exposa la doctrine de la renaissance en tant que vérité vérifiable.
*9
Suivant les instructions du Bouddha, ses disciples développèrent aussi cette connaissance de « rétrocognition » et furent aptes à lire, bien que vaste, un nombre limité de leurs vies passées. Le pouvoir du Bouddha dans ce domaine était illimité.
Certains Rishis indiens, aussi, avant l’avènement du Bouddha, se distinguèrent par de tels pouvoirs supranormaux tels que la clairvoyance, la télépathie, la télesthésie, et ainsi de suite.
Bien que la science ne tienne pas compte de ces facultés supranormales, d’après le Bouddhisme, les hommes qui ont une concentration mentale très développée cultivent ces pouvoirs psychiques et peuvent lire leur passé de la même manière que quelqu’un pourrait se remémorer un incident passé dans cette vie présente. Avec leur aide, indépendamment des cinq sens, une communication de la pensée et la perception directe d’autres mondes sont rendus possibles.
Quelques personnes extraordinaires, spécialement lors de leur enfance, développent spontanément, d’après les lois de l’association, la mémoire de leurs vies passées et se remémorent des fragments de leurs naissances antérieures.
*10
« Pythagore est censé s’être souvenu distinctement d’un bouclier dans un temple grec qui y avait été transporté par ses soins lors d’une précédente incarnation durant le siège de Troie.
*11
En quelque sorte ces enfants extraordinaires perdent cette mémoire ultérieurement, comme dans le cas de nombreux enfants prodiges.
Des expériences faites par des médiums modernes dévoués, les phénomènes d’apparition de spectres, les communications avec des esprits, des personnalités multiples et suppléantes ont projeté quelque lumière sur ce problème de la renaissance.
Les psaumes des frères moines (Theragâthâ) relatent de façon intéressante l’histoire d’un Brahmane se nommant Vangîsa, « qui acquit son renom en tapotant sur des crânes humains avec ses ongles et en découvrant par là-même où leurs occupants antérieurs renaquirent. »
Certaines personnes à certaines époques exprimèrent diverses personnalités au cours de leurs vies particulières. Le professeur James cite des cas remarquables dans ses « Principes de la psychologie » (« Principles of Psychology » (Référez-vous à « Human Personality and its survival of bodily Death », (« La personnalité humaine et sa survie lors de la mort physique »)). Le Visuddhimagga mentionne un incident intéressant d’un deva qui entra dans le corps d’un homme laïc. (Référez-vous au « The Path of Purity », (« Le sentier de la Pureté ») I, p.48).
L’auteur lui-même a rencontré des personnes qui furent employées comme des médiums par des êtres invisibles afin que ces derniers fassent part de leurs pensées, et d’autres qui étaient possédées par des esprits mauvais. Quand ils sont habités de ces états hypnotiques, ils parlent et font des choses dont ils sont normalement totalement ignorants et dont ils ne peuvent se souvenir ensuite.
Dans ces états hypnotiques, certains peuvent relater des expériences de leurs vies passées, tandis que quelques autres, tels que Edgar Cayce des Amériques, furent capables non seulement de lire les vies passées d’autrui mais aussi de guérir les maladies.
*12
Le phénomène de double personnalité peut être expliqué aussi bien en tant que réminiscence d’expériences personnelles passées qu’en tant que « possession par un esprit invisible. » La première explication apparait plus raisonnable, mais la seconde ne peut être totalement rejetée.
Souvent nous rencontrons des personnes que nous n’avons pas rencontrées précédemment, mais avec qui, nous le ressentons instinctivement, nous sommes familiers. Souvent nous visitons des lieux et nous nous sentons instinctivement impressionnés comme si nous étions très familiers avec cet environnement.
Ce furent de telles expériences qui conduisirent Sir Walter Scott à concocter un sens de la métempsychose. Son biographe Lockhart cite, dans sa « Vie de Scott » le passage suivant extrait du journal de bord de Scott le 17 février 1828 :
« Je ne peux, j’en suis sûre, dire si cela mérite d’être noté, le fait que hier au moment du diner, je fus étrangement habité par ce que j’appelle le sens de la préexistence, une idée confuse que rien de ce qui se dit ne le fut pour la première fois, que les mêmes sujets avaient déjà été discutés et que les personnes avaient exprimé les mêmes opinions. La sensation fut si forte au point de ressembler à un mirage dans le désert ou à la calenture à bord d’un navire. »
« Bulwer Lytton décrit ces expériences mystérieuses comme cette forme étrange de mémoire spirituelle et intérieure qui nous rappellent souvent des lieux et des personnes que nous n’avons pas encore vus dans cette vie, et que les platoniciens considèreraient comme étant la conscience d’une vie antérieure non étouffée et qui lutte. » (H.M. Kitchener, « The Theory of Reincarnation », « La théorie de la réincarnation », p.7)
L’écrivain a aussi rencontré quelques personnes qui se souviennent de fragments de leurs naissances passées et aussi un docteur distingué en Europe qui hypnotise les gens et les aide à décrire quelques-unes de leurs vies passées.
Le commentaire sur le Dhammapada relate l’histoire d’un époux et d’une épouse qui, voyant le Bouddha, tombèrent à ses pieds et le saluèrent, disant, « Cher fils, n’est-ce pas le devoir des fils de prendre soin de leur mère et de leur père quand ces derniers sont devenus vieux ? Comment se fait-il que tu ne te sois pas montré à nous pendant si longtemps ? C’est la première fois que nous te voyons (dans cette vie !). »
Le Bouddha attribua cette explosion soudaine d’amour parental au fait qu’ils avaient été plusieurs fois ses parents au cours de vies antérieures et il fit la remarque suivante :
« En raisons d’anciennes associations ou d’un avantage présent
Ce vieil amour apparait brusquement à nouveau tel le lotus dans de l’eau.
*13
Dans ce monde apparaissent des personnalités grandement développées et des êtres parfaits tels que le Bouddha. Pouvaient-elles évoluer de façon soudaine ? Pouvaient-elles être les produits d’une seule existence ? Comment devons-nous nous représenter des personnalités telles que Confucius, Pânini, Buddhaghosa, Homère et Platon, des génies tels que Kâlidasa, Shakespeare, des enfants prodiges tels que Ramanuja, Pascal, Mozart, Beethoven et ainsi de suite ?
Pouvaient-ils être si exceptionnels s’ils n’avaient pas mené des vies nobles et vécu des expériences similaires par le passé ? Est-ce par un pur hasard qu’ils naquirent de ces parents particuliers et qu’ils furent confrontés à ces circonstances favorables ?
Les enfants prodiges, aussi, semblent poser des problèmes aux scientifiques. Quelques médecins adoptent l’opinion selon laquelle les prodiges sont le fruit de glandes anormales, spécialement l’hypophyse, la glande surrénale et la glande pinéale. L’hypertrophie extraordinaire de glandes d’individus particuliers pourrait aussi être due à une cause karmique passée. Mais comment, par simple hypertrophie de glandes, un Christian Heineken put parler quelques heures seulement après sa naissance, répéter des passages de la Bible à l’âge de 1 an, répondre à toutes questions de géographie à l’âge de 2 ans, parler français et latin à l’âge de 3 ans, et étudier la philosophie à l’âge de 4 ans ; comment John Stuart Mill pouvait lire le Grec à l’âge de 3 ans ; comment Macaulay pouvait écrire l’histoire du monde à l’âge de 6 ans ; comment William James Sidis, enfant prodige des Etats-Unis, pouvait lire et parler à l’âge de 2 ans, parler Français, Russe, Anglais, Allemand et un peu de Grec et de la Latin à l’âge de 8 ans ; comment Charles Bennet de Manchester pouvait parler en plusieurs langues à l’âge de 3 ans, ce sont des évènements merveilleux incompréhensibles pour les scientifiques.
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La science ne peut expliquer non plus pourquoi des glandes s’hypertrophieraient seulement chez certains et non chez d’autres. Le vrai problème demeure irrésolu.
La seule hérédité ne peut expliquer l’existence des enfants prodiges, « autrement leur généalogie le divulguerait, leur postérité, dans un degré plus important qu’eux-mêmes, le démontrerait. »
La théorie de l’hérédité devrait être parachevée par la doctrine du kamma et de la renaissance pour une explication adéquate de ces problèmes déconcertants.
Est-il raisonnable de croire que la durée de la vie présente est la seule existence entre deux éternités de bonheur ou de misère ? Les quelques années que nous passons ici, tout au plus cet ans, doivent certainement être une préparation inadéquate pour l’éternité.
Si quelqu’un croit dans le présent et dans un futur, il est logique de croire au passé.
S’il y a une raison de croire que nous avons existé dans le passé, alors certainement il n’y a pas de raison de ne pas croire que nous continuerons à exister après que notre vie présente ait apparemment cessé.
« Nous sommes venus contempler le présent comme l’enfant du passé et comme le parent du futur. » T H. Huxley.
C’est en fait un argument clé en faveur des vies passées et futures car, comme le dit Addison, dans ce monde des personnes vertueuses sont très souvent malheureuses et des personnes vicieuses sont prospères. »
Nous sommes nés dans un état créé par nous-mêmes. Si, malgré notre bonté, nous sommes contraints à vivre une vie malheureuse, c’est du à notre kamma négatif passé. Les actes présents bons et mauvais, toutefois, produiront leurs effets inévitables dès que la toute première occasion se présentera.
Un écrivain occidental dit :
« Que nous croyions dans une vie passée ou non, cette théorie constitue la seule hypothèse raisonnable qui comble certains fossés dans la connaissance humaine au sujet de faits de la vie de tous les jours. Notre raison nous dit que cette idée d’une vie passée et du kamma est la seule pouvant expliquer, par exemple, les degrés de différences existant entre des jumeaux, comment des hommes tels que Shakespeare, avec une expérience très limitée, sont capables de représenter, avec une exactitude prodigieuse, les types les plus divers de caractères humains, de scènes, et ainsi de suite, dont ils n’avaient aucune connaissance réelle, pourquoi l’œuvre d’un génie invariablement transcende son expérience, l’existence de la précocité d’un enfant en bas âge, et la grande diversité au niveau des esprits et des morales, du cerveau et de l’apparence physique, des conditions de vie, des circonstances et des environnements, observables de par le monde. »
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